Technologies & Politique numérique — Le Royaume du Maroc affirme avec détermination son ambition de devenir un acteur majeur de la transformation digitale sur le continent. À travers une stratégie structurée, des projets innovants et des partenariats stratégiques, le pays trace sa voie vers un modèle numérique souverain.
Du 14 au 16 avril 2025, la ville de Marrakech accueille la troisième édition du Gitex Africa, l’un des plus grands rassemblements technologiques du continent. Ce rendez-vous, devenu incontournable, illustre à quel point le Maroc est engagé dans la construction d’un écosystème numérique robuste, compétitif et inclusif. Plus de 1 500 entreprises, 800 startups et 400 investisseurs, venus de 130 pays, y sont attendus. Mais au-delà de l’événement, c’est toute une vision qui s’affirme : celle d’un Maroc digital, résolument tourné vers l’innovation et la souveraineté technologique.
Des initiatives structurantes au cœur de la stratégie nationale
Portée par le ministère de la Transition numérique, la stratégie « Maroc Digital 2030 » intègre l’intelligence artificielle, la cybersécurité, la transformation des compétences et le soutien à l’innovation comme piliers de développement. Plusieurs annonces majeures marquent cette édition du Gitex Africa :
- La création d’un Sommet du futur de la couverture en Afrique, dédié aux enjeux de connectivité, du Cloud et de la 5G ;
- Le lancement du Studio de la Diaspora africaine, pour renforcer le lien entre les talents africains de la diaspora et les dynamiques d’innovation locales ;
- Le programme Morocco 200, visant à accompagner 200 startups marocaines par un appui financier, un mentorat ciblé et une exposition internationale.
La Tech PME au centre de la scène
Grande nouveauté de cette édition : l’installation d’un village dédié aux PME technologiques. Trop souvent éclipsées par les géants de la tech et les jeunes startups en vogue, ces entreprises constituent pourtant l’épine dorsale du secteur numérique marocain. Elles développent, installent, sécurisent et interconnectent les infrastructures essentielles à la digitalisation du pays.
Redouane Lhaloui, président de la Fédération des technologies de l’information (APEBI), insiste : « Les PME Tech, ce sont plusieurs milliers d’acteurs qui travaillent souvent dans l’ombre, mais qui façonnent au quotidien notre paysage numérique. Il était temps de reconnaître leur rôle central. »
Intelligence artificielle : levier de transformation, défi éthique
L’intégration de l’IA dans les politiques publiques et les services économiques s’accélère au Maroc. Que ce soit dans l’industrie, la logistique ou les services, l’IA promet des gains d’efficacité considérables. Mais elle soulève également des défis éthiques et sociaux majeurs. Pour des experts comme Yasser Monkachi, il est crucial que cette technologie ne soit pas abordée comme une simple tendance, mais comme un outil stratégique, au service de l’humain.
Cela implique une vision claire, une gouvernance éthique et une culture d’apprentissage continu. Car si l’IA peut optimiser les processus, elle peut aussi induire des biais, homogénéiser les idées ou menacer la diversité créative.
Cybersécurité : entre vigilance et résilience
À l’heure de la transformation digitale, la sécurité numérique devient un enjeu national. L’essor de l’IA, de l’IoT et de la connectivité crée autant d’opportunités que de vulnérabilités. Les récents incidents — dont l’attaque contre des institutions publiques marocaines en avril 2025, notamment la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) — rappellent l’urgence de renforcer les dispositifs de protection.
Le Maroc, à travers la Direction générale de la sécurité des systèmes d’information (DGSSI), a mis en place des mécanismes de défense, mais les experts s’accordent à dire qu’il faut aller plus loin : renforcer la culture du risque numérique, sensibiliser l’ensemble des acteurs et anticiper les menaces futures.
L’Agence de développement du digital : catalyseur de la transition
Pilier de cette transformation, l’Agence de développement du digital (ADD) joue un rôle stratégique dans la mise en œuvre des politiques numériques. Sous la direction de Sidi Mohammed Drissi Melyani, l’ADD agit sur plusieurs fronts : digitalisation de l’administration, soutien aux startups, inclusion numérique, et promotion des partenariats Sud-Sud.
« Notre mission est de créer un environnement favorable à l’émergence d’une économie moderne, compétitive et connectée. Nous accompagnons les institutions publiques comme les acteurs privés dans la transformation digitale », explique M. Drissi Melyani.
L’ADD soutient également des plateformes comme StartupHubMaroc ou le label JEI pour jeunes entreprises innovantes, tout en travaillant à la mutualisation des ressources numériques entre administrations publiques.
Le message du Maroc à l’Afrique
À travers le Gitex Africa et ses projets structurants, le Maroc confirme sa volonté de contribuer activement à l’édification d’une Afrique numérique forte et souveraine. Le pays s’appuie sur sa jeunesse, ses compétences et ses alliances continentales pour partager son savoir-faire et encourager une innovation endogène.
« L’Afrique n’est plus spectatrice de la révolution numérique. Elle en devient l’un des moteurs. C’est en misant sur nos talents, en renforçant notre coopération et en mutualisant nos efforts que nous bâtirons un avenir digital commun », conclut le directeur général de l’ADD.